Blog Paroles d’hommes

Je suis veuf et je purge ma peine

26 mars 2021




Elle s'appelait Nana,

Et c'Ă©tait ma femme. 

Nous nous sommes connus trÚs jeunes et nous avons ensuite cheminé ensemble pendant 20 ans.

Nana, 

Elle Ă©tait simple, rĂ©servĂ©e et parfois trop timide. 

Elle aimait les grands espaces, et ne jurait que par la vie en plein air, ma Nana.

AprÚs notre mariage, nous avons vécu à la campagne avec nos deux enfants.

Nous faisions la route tous les jours pour le travail et l'école. Mais ça nous était égal, Nana et moi.

Nous aimions notre vie et nous Ă©tions heureux. 

Nous Ă©tions heureux jusqu'Ă  ce fameux jour...le jour oĂč la terre s'est arrĂȘtĂ©e. 

12h18! Un chauffard n'a pas fait attention, et Nana a rebondi sur son capot.

12h18! Ma Nana nous disait adieu sans vraiment comprendre pourquoi. 

Le tĂ©lĂ©phone a sonnĂ©, j'ai hurlĂ©, et mon coeur s'en est allĂ©. 

Je m'appelle Jacques et je suis veuf.

Veuf depuis des annĂ©es, 

Meurtri depuis ce 21 aoĂ»t. 

J'ai essayĂ© de survivre... pour les enfants. 

J'ai essayé de rester solide pour qu'ils puissent compter sur moi.

Ce fut long, difficile et douloureux, mais je n'avais pas le choix.

Ils me traitent de vieux garçon, d'homme difficile, de blessĂ© de guerre, mais ils ne savent pas. 

Ils ne me connaissent pas.

"Il a tout et il ne veut pas se remarier, il est bizarre "

Non mesdames, je n'ai pas tout.

Je ne peux pas aimer, 

Je ne peux plus aimer,

Je ne veux pas aimer, 

Je ne veux pas blesser.

Refaire ma vie? 

Un jour peut-ĂȘtre, 

Pour le moment, je ne le souhaite pas. 

Je suis bien comme ça. 

21 août 10h45, je lui avais demandé de se libérer pour déjeuner à midi.

J'avais une surprise pour elle, et elle, elle Ă©tait trĂšs occupĂ©e par son travail. 

J'ai insistĂ©, c'Ă©tait important, je voulais qu'elle sache, je venais de recevoir la bonne nouvelle : "Nana, je suis promu pour ce poste tant convoitĂ© Ă  l'international, on rentre enfin chez nous." "On retourne au pays. Sur la terre de nos ancĂȘtres. "


Nana , ma Nana, tu t'es dĂ©pĂȘchĂ©e de terminer ce que tu avais Ă  faire et tu as pris ton aprĂšs-midi. 

Tu courais me rejoindre pour fĂȘter la bonne nouvelle, et peut-ĂȘtre n'as-tu pas vu ce chauffard... Nana.

Je m'appelle Jacques et je suis veuf.

Mon impatience a tué la femme que j'aimais.

Ne me dites surtout pas que je ne suis pas coupable, car je le suis.

Il n'y avait pas urgence, j'aurais pu attendre, si seulement si...

Oh Nana.. Nana...comment faire sans toi?

Tes derniers mots me hantent,

Et cet accident, cet accident...

Si seulement j'avais attendu.

Nana...je t'en prie...pardonne-moi.


Yann V. TSOBGNI

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