Qui sont les malinkés ?

30 juillet 2021


Crédit photo: Danse traditionnelle guinéenne

Les Malinkés, Maninka ou Mandingue, se situent principalement en Afrique de l’Ouest. On retrouvera donc ce groupe ethnique d’environ 10 millions de personnes, majoritairement en Guinée, en Côte d’Ivoire, au Mali, au Sénégal et en Gambie.

Parce qu’ils sont traditionnellement sédentaires, les Malinkés pratiquent généralement des activités qui sont justement en adéquation avec leur mode de vie. Ils peuvent donc être agriculteurs, forgerons, bijoutiers ou alors commerçants en fonction des saisons et de leurs castes.

La société Malinké est en effet divisée en trois castes à savoir : les nobles, qui sont issus des lignées impériales, les artisans, qui regroupent des métiers relatifs à la transformation des matières premières et enfin, les captifs ou esclaves.

Malgré un abandon graduel de ces fonctions dû à la colonisation, puis à la mondialisation, les pratiques séparatistes régissant le concept de caste ont résisté au temps. C’est pourquoi encore aujourd’hui, certaines familles refusent l’union de personnes issues de castes différentes.

 

D’où sont-ils originaires ?

Les Malinkés viendraient du Sud du Mali. Le premier village du nom de Kita, anciennement Kirina – qui a abrité la bataille entre Soundjata Keita et Soumangourou Kanté - aurait été fondé par la famille Camara, première de la lignée. De cette dernière, vont dériver d’autres ethnies telles que les Bambaras avec qui les rapports seront conflictuels, de par leur refus d’adopter l’Islam, principale religion des Malinkés depuis la conversion de Soundiata.


Le Sanankouya, solidification des liens par la plaisanterie

Le Sanankouya ou parenté à plaisanterie serait issu de la charte de Kurukan Fuga établie à l’oral en 1236 dans l’empire du Mali. Pour la petite histoire, cette charte est établie par Soundiata Keita, juste après sa victoire à la bataille de Kirina.  Il va réunir les représentants des 12 provinces de l’empire du Mali qui sera alors proclamé et mettra en place les 44 articles qui composeront la charte.

Ainsi, le Sanankouya est une stratégie de diplomatie qui vise à conserver les liens entre certains clans*. En effet, établi en fonction de leur patronyme, le cousinage entre ces différentes tribus est un passe-droit leur permettant d’entretenir des rapports non-conventionnels même entre étrangers. Le choix des Sanankus ou cousins à plaisanterie s’est naturellement fait sur la base des affinités que les clans ont développé entre eux. Ces relations qu’ils devront conserver de générations en générations obéissent à certaines conditions qui peuvent aller de l’interdiction de célébrer des mariages entre des individus appartenant à ces deux clans au respect d’un code qui veut qu’en cas de problème, les clans puissent s’apporter une aide inconditionnelle**.

Les liens de Sanankuya peuvent se manifester par des joutes verbales ou physiques qui s’articulent généralement autour des relations hiérarchiques qui lient les clans entre eux. Ainsi, deux Sanankus peuvent s’amuser à deviser sur lequel d’entre eux est supérieur à l’autre en fonction du statut affilié à leur nom de famille, comme l’indique la conversation suivante entre un Peulh – Sidibé - et un Bambara -Doumbia - :

Doumbia:  He, fulajçn4 a bE di?

He, l’esclave peul, comment vas-tu ?

Sidibe: Bamanan geren a bE di ? I tE i matigikE fo wa ?

Comment vas-tu Bambara pas fini (« pas mûr »). Tu ne peux pas saluer ton maître ?

Doumbia : Ko ni i ye f(u)la ye, ni a ma filanan ye, da a la ko namarato dçn !

Il paraît que si tu vois un Peul sans voir le deuxième dis-toi que c’est un malhonnête (bandit).

Sidibe : Ni anw tE aw tE balo !

Sans nous, vous ne vivez pas !

N’i ye a mEn ko nçnç ni misi anw de don, bamananden

Si tu entends « lait » et « vache », c’est grâce à nous, salopard (« fils de bambara »)

Doumbia : O tuma na, e ma mEn ko fila ni a ka misiw, ni bErE, ni sakosi bE

faralen "Nçgçn kan ka tE kilo mugan bç wa ?

Alors, n’as-tu pas déjà entendu qu’un Peul plus ses vaches, plus son bâton, plus toutes ses affaires ne vaut même pas vingt kilos ?

A bE i ko, aw yErE tE dumuni sçrç ka kE !

On dirait que vous-même ne trouvez même pas de quoi manger !

 Sidibe: He ! bamanan geren e koni ye jçn yErE de ye !

He ! Bambara pas fini (« pas mûr »), tu es vraiment un esclave !

Ni kuma tE i da dçrçn, a fç ko jEgE bE ji la !

Si tu n’as rien à dire, dis plutôt que le poisson est dans l’eau !

I matigikE de ye ne ye !

C’est moi ton maître ! **


Si jamais, il vous arrive au détour d’une rue d’entendre une conversation de cette teneur, passez votre chemin ! Ceci est une simple démonstration de fraternité.

 

Sources :         

*« Le Sanankuya ou Plaisanter pour éviter les conflits ». s. d. Consulté le 6 juin   2021. http://www.afrique-gouvernance.net/bdf_experience-314_fr.html.

**Cécile Canut, « Pouvoir, places et filiation : les senankuya au Mali », Cahiers de praxématique [En ligne], 38 | 2002, document 6, mis en ligne le 01 janvier 2010, consulté le 08 septembre 2020. URL : http:// journals.openedition.org/praxematique/2307;DOI:https://doi.org/10.4000/praxematique.2307.


Fatou Coulibali

 

 

 

 


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