Mon vécu en tant que jeune femme albinos

July 30, 2021


         Crédit photo: Pinterest 


Je me nomme E.M et j’ai 25 ans. Je suis originaire du Cameroun et je poursuis actuellement mes études universitaires dans la ville de Douala. En tant que femme albinos, je souhaite faire un témoignage sur la vie des albinos dans la société. 

Les personnes atteintes d’albinisme continuent de faire l’objet de discrimination et de se heurter à des obstacles qui les empêchent de participer pleinement à la vie économique, sociale, politique et culturelle.

Citons entre autres, la discrimination sociale , les maladies ( en occurence du cancer de la peau) , des situations socio économique généralement très précaires , le manque de confiance en soi , le non accès aux services publics ( emplois , éducation ) .


Mythes et marginalisation

Les personnes albinos sont confrontées à la marginalisation sociale en raison du réseau de croyances et des mythes entourant leur situation.

Les mythes sont à l’origine des croyances répandues mais non fondées. En Afrique des nombreux mythes circulent autour des personnes vivantes d’Albinisme, ces dernières sont très souvent présentées comme des personnages surnaturels.


Elles subissent par conséquent des actes d’extrême violence et sont tuées dans la majeure partie des cas pour servir dans des potions magiques et amulettes utilisées par les sorciers. Les malfaiteurs en font une source de revenus car selon eux, certaines parties du corps des Albinos contiennent des pouvoirs mystiques et valent très chères.


Afin que des solutions soient apportées à cette population,  il est indispensable selon moi  de suivre les cinq axes suivants :

a) Reconnaître les formes multiples et croisées de discrimination auxquelles sont exposées les personnes atteintes d’albinisme. Discriminations fondées sur leur handicap, leur couleur, leur sexe,  et prendre les mesures drastiques nécessaires pour lutter contre ces discriminations;

b) Informer et sensibiliser l’opinion au sort des personnes atteintes d’albinisme;

c) Prendre des mesures spécifiques d’inclusion afin d’améliorer l’accès des personnes atteintes d’albinisme aux services (éducation, santé et autres) et aux ressources matérielles (emploi et sources de revenus);

d) Garantir la participation des personnes atteintes d’albinisme à la vie sociale, politique, civique et culturelle par exemple concours de Miss. 

e) Sensibiliser la population générale 


La sensibilisation 

En parlant de sensibilisation, je pense qu’elle est très importante, et surtout chez les plus petits parce que mon enfance en tant qu’albinos n'était pas facile. Je prenais les paroles et les actes blessants à cœur et surtout au premier degré.


À l’école, les camarades attribuaient des noms blessants, ils disaient que je ne voyais rien quand il y’à du soleil.  La majorité des enfants n’aiment pas jouer avec les albinos juste à cause de la différence de peau. 

À cause de ce rejet, je ne voulais plus aller à l'école et je déprimais. Je n’avais pratiquement pas d'ami, c'était très difficile mais heureusement, il y avait toujours des personnes pour me remonter le moral. Grâce à eux j’ai tout de même pu avancer.


C’est vraiment important de garantir notre participation à la vie sociale, politique et culturelle comme je l'ai cité plus haut. C’est très important d’être libre, d’avoir ses hobbies, ses projets, ses rêves. Malheureusement, la majorité des albinos se renferme sur elle et se construit des barrières psychologiques qui les empêchent de s’épanouir. Surtout par rapport à la discrimination qu’ils ont vécu dans leur enfance.


Situation vécue

En classe de seconde par exemple, j’avais décidé de faire le concours de miss à la kermesse scolaire;  j'en avais toujours rêvé depuis toute petite. J’ai donc pris mon courage à deux mains et je m’y suis inscrite. Malheureusement, les organisateurs se sont moqués de moi; la chargée d’affaires culturelles a tout arrêté et m’a posé la question de savoir ce que je venais chercher là. J'ai répondu que je souhaitais participer au concours miss. Une fois encore, tout le monde s’est moqué de moi; certains m’insultaient et me disaient des paroles blessantes: “ tu ne vois rien et tu veux faire miss de quelle manière? les miss c’est pas pour les ngengerou (un nom attribué au albinos dans mon pays)”; ça m’a tellement choqué et je suis directement rentrée chez moi.

Je ne voulais parler à personne et j’en voulais à tout mon entourage. Je n’étais pas bien dans ma peau, je repensais à mon quotidien et c’était très difficile.  J’avais complètement arrêté d’aller au lycée. Quelque jours plus tard, j’en avais finalement parlé avec ma mère. Elle m'a beaucoup réconfortée et donne des conseils. Ce qui m'a aidé à continuer à vivre comme avant.


Des comportements pareils nous détruisent de l’intérieur. J’en ai beaucoup souffert dans ma vie en tant qu’albinos. Il est vrai que j’ai confiance en moi, mais les souvenirs ne sont pas complètement partis. Je souhaite juste vous dire qu’on est tous pareils peu importe les couleurs de peau; et que les mots blessants peuvent avoir un grand impact sur la vie des autres.

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