Blog Santé mentale & tabous

Trouble du Spectre de l’autisme dans nos communautés, quel regard?

March 26, 2021






Quel regard sur le trouble de TSA dans les communautés noires? La détresse cachée des parents qui peuvent vivre la situation de leur enfant comme une honte, et finir par s’isoler socialement avec ce dernier. Yolande, Éducatrice spécialisée et fondatrice de l’association Handicap Action nous parle de son expérience auprès des enfants et des parents. 


Q: Bonjour Yolande, tu peux te présenter a ceux qui nous lisent?

Je suis la fondatrice de l’association Handicap Action, diplômée en éducation spécialisée, formatrice et conférencière. Je suis également conseillère clinique spécialisée dans la prise en charge des personnes ayant des difficultés neurologiques. J'ai exercé dans différents milieux (scolaires, DI-TSA, adolescents, adultes, parents) et je travaille présentement au projet Continuum TSA dans l’une des plus grandes commissions scolaires de Montréal. Je cumule plus de 10 ans d’expérience et j'ai vraiment à cœur les besoins de la personne humaine. 


Q: Parle-nous un peu du TSA? Trouble du spectre de l’autisme

On peut dire que c’est un continuum où l'enfant peut se situer à un niveau ou à un autre, une condition neuro développementale qui permet un fonctionnement et un traitement de l’information différent du cerveau.


Q:Quelle est ton expérience avec les communautés noires? 

L’ignorance et la non connaissance de l’autisme ne facilitent vraiment pas la tâche. Les tabous et préjugés peuvent prendre le dessus et empêcher considérablement de répondre aux besoins de l’enfant. On pense encore que c’est une maladie qui ne nous concerne pas et on peut même aller jusque crier au complot du milieu scolaire qui propose des solutions qui ne nous conviennent pas. Les enfants sont pris en charge tardivement. A force de croire que ça va aller et en utilisant des méthodes peu adéquates pour essayer de le "redresser".

Les familles peinent à en discuter malgré que nous sommes là pour trouver des solutions avec elles.  On peut observer une très grande fermeture chez plusieurs parents et cela nuit convenablement à la prise en charge de leurs enfants. Les familles ont également honte de sortir avec leurs enfants, ce qui peut créer un isolement général.


Q: Tabous et préjugés ? quels sont-ils?


De mon expérience, j'ai souvent entendu les propos suivants: l’enfant est têtu, il n’écoute pas, Il se développe différemment. Certains parents pensent que ce dernier va guérir de ce qu'ils pensent être une maladie et qu'il faut faire des prières de délivrance.


Q: Plusieurs parents ne veulent pas qu’on sache qu’ils ont un enfant atteint du TSA, ils les cachent dans les maisons, à ton avis, pourquoi?

L’autisme est très peu connu dans nos communautés, c’est l’enfant de la honte, il n’est pas comme les autres, il ne pourrait pas être ingénieur ou docteur.

Q: Pourquoi le diagnostic de TSA cause parfois la séparation des couples? 

Les familles cherchent de quel côté vient le mal, il y’a beaucoup de suspicion. C’est en majorité perçu comme la faute des femmes, c’est l’enfant de la femme. Elle est méprisée par la belle famille, elle doit en prendre soin toute seule et elle s’épuise.

Q: Peut-on dire que les hommes abandonnent les femmes et les enfants?Si j’ai intervenu avec 20 familles, au moins 16 sont monoparentales. Très souvent, la famille de l’homme ne veut rien avoir à faire avec ce qu'ils considèrent comme étant une honte.

Q: Quelles sont les difficultés pour les enfants avec un diagnostic de TSA 

  • Difficultés au niveau du comportement ( non compréhension des codes sociaux) et de la communication.
  • Difficultés d’apprentissages, de sommeil, difficultés sensorielles, rigidités alimentaires, difficultés au niveau des habitudes de la vie quotidienne (toilette, propreté, habillage etc).
  • Difficultés de garder un travail avec les multiples RDV pour les enfants.
  • Certains parents vivent de gros traumas et ne veulent plus faire des enfants; peur d’avoir un 2ème autiste. 
  • Peur d'affirmer la différence de l’enfant. 
  • Isolement, précarité.
  • Difficultés à trouver un équilibre au niveau de la fratrie.
-Avoir un accompagnement psycho-social
  • Prendre le temps de faire le deuil et par la suite chercher des services pour leurs enfants. Plus vite on amorce la prise en charge, plus vite on aide l’enfant à atteindre son plein potentiel et une autonomie future.
  • Ils doivent se former, chercher de l’information et surtout ne pas s’éparpiller. Être à l’affût des formations et interventions basées sur les données probantes, éviter de croire au miracle, chaque enfant est différent et évolue à son niveau.
  • Prendre du temps pour eux, prendre des pauses pour être disponibles.
  • Participer aux initiatives aidantes (ateliers santé mentale des parents, sensibilisations, formations). Les ateliers aident les parents à mieux comprendre leur enfant, facilitant ainsi la vie au quotidien.

Il faut noter que les profils sont différents, même ceux qui sont diagnostiqués au niveau 1 ont des défis au niveau de la socialisation et autres. Les enfants doivent aussi faire face à plusieurs rendez vous chez différents spécialistes et ce n'est pas facile.


Q: Conséquences au niveau des parents? Comment vivent les parents?


Chercher des solutions, entamer des batailles avec les professionnels et les intervenants pour avoir des services. Le stress augmente et l’épuisement arrive.


Q: Selon tes observations, qu’est-ce qui aiderait ces parents?


-Disposer d'un réseau d’intervenants noirs pour aider les parents dans la prise en charge et sensibiliser les autres membres de la communauté à une plus grande acceptation

-Formation des parents au TSA

-Sensibilisation dans les familles


Q: Quel est le trajet de soins qu’un parent devrait suivre pour mieux aider son enfant?




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